Aujourd’hui, j’aimerais évoquer l’aspect spirituel du deuil… que ceux qui pensent que la vie s’arrête après la mort s’arrêtent là. En quoi, le travail de deuil peut-il être une vraie occasion de transformation intérieure ?
Le processus de deuil nous ramène au cœur du cœur de nous-mêmes. C’est vraiment le lieu où se fabrique tout le lien avec le disparu. C’est cela, la finalité du deuil : créer le lien intérieur avec l’être décédé. Et ce cœur du cœur de nous-mêmes, c’est aussi le lieu de l’esprit. Et tout l’enjeu du deuil, c’est de préserver ce lien, la souffrance en moins, au fil du temps avec l’être disparu.
C’est aussi le lien qu’on rencontre dans la méditation. Quand notre esprit se pose, il va spontanément dans ce lieu à l’intérieur de nous-mêmes. Et là, il y a la possibilité dans le vécu du deuil de reconnaître ce lieu-là et de ne pas l’associer à la perte. Il y a ce lieu-là qui nous est amené par la perte mais la perte nous révèle quelque chose de ce lieu-là. La perte présente une occasion qu’on n’a jamais eue, c’est de découvrir à la fois l’être qu’on a perdu mais aussi soi-même. Le cœur du cœur de soi-même peut nous être révélé par ce processus douloureux mais qui, après plusieurs années peut être un lieu de quiétude où on rencontre l’être qu’on a perdu en paix. Donc deuil = oubli, il faut complètement oublier. Au contraire il vaut mieux accueillir le deuil comme une réalité et accompagner le processus du mieux qu’on peut pour pouvoir installer au fil des années cette présence précieuse à soi.
Il faut essayer de poser son esprit pour faciliter l’accès à cette dimension-là.
Ce n’est pas facile de poser son esprit alors qu’on est submergé par le chagrin, la détresse et le manque. Mais essayer de le faire autant qu’on peut, permet d’ouvrir notre cœur aux émotions qui se lèvent. Il faut essayer de les rencontrer telles qu’elles sont, ne pas chercher à transformer, ne pas chercher à s’opposer, laisser faire, laisser aller, laisser couler.
C’est pour moi la seule approche intérieure qui est nécessaire. Après, il y a tout ce qu’on peut faire pour l’autre. Se mettre en paix, si on considère qu’il y a une continuité de la conscience après la mort, invite l’autre à se mettre en paix.
On peut aussi mettre de la lumière et inviter l’âme à poursuivre son chemin et la laisser partir. Je suis dans la peine mais je te laisse partir.
Il ne faut pas confondre le processus psychologique et le processus spirituel. On peut être dans une peine terrible, un manque terrible, vivre l’absence au jour le jour de façon terrible et en même temps, au fond de son cœur, dire à l’autre qu’il peut partir et continuer son chemin, qu’il peut rester en lien avec nous de façon subtile.
Mais il ne faut pas mélanger les deux chemins. Ils marchent main dans la main mais il y a le processus psychologique qui est malheureusement toujours long en tant que tel et le processus spirituel.